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Restauration écologique des estuaires

Le cours suivant sera utilement complété par cette présentation abrégée :

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En quoi consiste la restauration écologique d’habitats estuariens dégradés ?

1. Définitions

1.1. Restauration et autres actions de réhabilitation

Le terme restauration a été utilisé dans plusieurs sens, mais il suppose normalement un retour à l’état initial. Dans le domaine de l’écologie, il faut voir la restauration comme s’appliquant à des écosystèmes complets et se souvenir que d’autres solutions, comme la réhabilitation et le remplacement, peuvent être plus réalistes. La restauration vise à la fois les aspects chimiques et physiques de l’habitat et les espèces elles-mêmes et leur habitat ; chacun de ces volets peut exiger des mesures particulières, mais il faut autant que possible se fier aux mécanismes naturels de restauration. En fait, si on a éliminé les sources de dégradation, les mécanismes naturels prennent le pas et ceci est souvent suffisant. Comme la restauration est un processus progressif, il peut être difficile de fixer des critères de réussite. Il faut avant tout se rappeler que l’écosystème doit se développer sans entrave dans le sens d’une amélioration.
Dans sa plus simple expression, la restauration d'écosystème a été défini par comme l’ensemble des initiatives prises pour améliorer un écosystème, lui permettant d’atteindre un meilleur état, quel qu’il soit. Cette définition n’implique pas de retour à un état antérieur, mais ne concerne que le rétablissement de certaines fonctions écologiques. Une définition maintenant considérée comme plus classique parle des procédés utilisés pour rétablir, en fonction des dégradations infligées par les activités humaines, un habitat ou un écosystème considéré comme viable autant dans sa structure que dans son fonctionnement. En résumé, restaurer un écosystème consistera donc à rétablir les fonctions perdues par cet écosystème, à remplacer certaines fonctions superflues ou à le remplacer entièrement par un autre écosystème qui remplira les fonctions visées.
 
La réhabilitation ne concerne que certaines fonctions et/ou une ou plusieurs espèces sélectionnées. On aboutit alors à un écosystème « simplifié » par rapport à l’écosystème initial.
Une fonction est une activité de l’écosystème aboutissant à un résultat précis. Elle se réalise grâce à un certain nombre de processus (ou opérations) auxquels participent les êtres vivants, au travers de leurs interactions.
 
Les attributs possèdent des caractéristiques inhérentes au système. Ils permettent de juger de l’évolution des indicateurs. Ce sont des variables dont la présence / absence ou la valeur quantitative reflète le niveau auquel se réalise la fonction.
Les écosystèmes peuvent être envisagés selon leur caractéristiques (attributs) structurels et fonctionnels mais que l’on doit tenir compte des deux dans toute entreprise de restauration. L’analyse des fonctions et leurs attributs permet de reconnaître les carences dans l’écosystème à restaurer. C’est à partir des attributs que l’on peut suivre le travail de réhabilitation et le monitorer.
 
Actuellement, la plupart des projets de restauration sont envisagés comme une atténuation d’effets non désirés et peuvent donc être envisagés comme une renaturation, par exemple :
- la végétalisation de carrières
- l’aménagement de friches industrielles, ou même
- la dépollution de rivières
 
Ces opérations peuvent se heurter à une approche patrimoniale qui nie la dynamique des systèmes et s’attache à des listes d’espèces. La conservation de la bio-diversité ne devrait pourtant pas être antinomique avec la « qualité » des écosystèmes.

1.2. Mesures compensatoires

Dans le cadre de mesures compensatoires dans le cadre de travaux d’aménagement, il peut être recommandé de « créer » un habitat particulier, hébergeant une faune et une flore spécifiques. Ce fut le cas après la construction de Port 2000 au Havre dans l’estuaire de la Seine qui a nécessité le dragage de 60 millions de mètres cubes de sédiments. Situé au nord-ouest de l'estuaire, le projet incluait des mesures environnementales compensatoires (pour 45.74 M €) :
- la reconstitution de vasières avec dragage d'un canal de réactivation (1.5 million de mètres cubes de sédiments fins dragués),
- de nouveaux secteurs de repos pour les oiseaux dont une île artificielle,
- la création des 70 ha a préservé le secteur,
- le suivi des activités de pêche sur une longue période

2. Objectifs de la restauration écologique des estuaires

Les objectifs de restauration doivent plus porter sur le fonctionnement écologique que sur la structure. L’un des aspects de l’écologie fonctionnelle prend en compte différents milieux, qui sont complémentaires entre eux. Ces milieux doivent être connectés, exister en quantité suffisante et être de bonne qualité. Ces interactions jouent également dans les domaines morpho sédimentaires et chimiques (zones de dépôt plus ou moins temporaires, de transport, d’érosion, adsorption, relargage, d’oxydation…).
Dans un premier temps, un inventaire des habitats existants (synthétisant les informations existantes et s’appuyant sur la collecte de compléments éventuels) est à réaliser dans l’estuaire afin d'en cartographier la distribution géographique. Les habitats estuariens tidaux ou non seront repérés. Il sera intéressant de porter l'effort sur les habitats tidaux dulçaquicoles.
 
Les objectifs de restauration doivent porter sur ces différents aspects, sachant qu’un écosystème qui fonctionne se doit de :
1. transférer de l’énergie, et donc s’organiser en réseaux trophiques
2. se composer d’habitats qui puissent abriter une diversité d’espèces (complexité, hétérogénéité)
3. se maintenir autour d’un équilibre dynamique
4. se développer et évoluer
5. inter-agir avec les écosystèmes adjacents
 
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 L’analyse de situations passées permettra de comprendre quelles sont les idées forces qui fonctionnent et quels sont les causes d’échec dans le développement d’activités humaines résultant en des effets négatifs sur l’environnement estuarien. On recherchera des actions-clés pour rompre la dynamique de compartimentation (toujours en cours) de l’estuaire aval et amont, tout en s’appuyant sur les projets à vocation environnementale en cours (Bradshaw, 1996). L'importance spatiale et la fonction principale de chaque habitat existant seront définies. La modélisation écologique permettra de prévoir les espèces qui se réinstalleront dans les habitats soumis à transformation. On s'efforcera aussi de définir les échanges prenant place au niveau des écotones qui représentent des zone de transition entre habitats voisins L'interface possède une richesse spécifique plus élevée que chacun des systèmes adjacents, par exemple entre les habitats du schorre et la slikke.
L’objectif prioritaire est le rétablissement de connexions fonctionnelles tant du point de vue hydrologique que biologique entre les terrains situés dans la plaine alluviale et l’axe fluvial, ainsi que l’amélioration de la circulation d’eaux douces de bonne qualité, en particulier dans les zones humides connexes péri-estuariennes.
 
L’objectif de restauration exige :
 Le rétablissement de connexions fonctionnelles
 La restauration et la re-création de vasières tant dans l’inter que le subtidal
 L’accroissement du volume de l’estuaire

3. Plan de restauration

3.1. Etat de référence

En théorie, il s’agit de comprendre le passé pour gérer le présent et le futur afin de construire un modèle de référence, mais cela est difficile car les systèmes sont en équilibre dynamique. Il existe deux méthode pour établir une telle référence :
Une approche théorique sur la nature de l’écosystème considéré, répondant à la question suivante : quelles sont les fonctionnalités à rétablir et en quelle quantité ?
 
Une étude historique de la structure et les fonctions de l’écosystème
Etablir un état de référence est indispensable même si cela peut sembler illusoire. Il s’agit en fait de s’accorder sur un projet que l’on peut considérer comme utopique dans le sens où il sera revu périodiquement et à chaque fois que nécessaire, en réponse aux évolutions infligées au milieu par les activités humaines ou autres facteurs de l’environnement.

3.2. Typologie des habitats estuariens existants ou potentiels

L’élaboration de cette typologie résultera de la connaissance et de la cartographie :
- des caractéristiques physiques : marnage, bathymétrie, aquifère et résurgences, topographie, propriétés des fonds, climatologie des états de mer …
- de la structure des peuplements (richesse spécifique, diversité biologique…),
- des fonctions réalisées (processus accomplis par ces espèces).
 
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 La possibilité de création de zones humides nouvelles (endigage de zones subtidales, aménagement de ballastières,….) sera prise en considération en parallèle avec un inventaire des contraintes écologiques tenant compte des aspects patrimoniaux (espèces protégées), des espèces invasives, des sites historiques et des aspects socioéconomiques (usages : chasse, agriculture, politique foncière). Une cartographie évolutive intégrera les nouvelles zones humides proposées suivant la typologie établie.
Le plan résultera du croisement des informations figurant sur un SIG qui sera alimenté en réponse aux besoins du groupe pilotant les opérations, débouchant sur l’adoption d’une stratégie de restauration des habitats et le choix de priorités de restauration en fonction des caractéristiques des zones humide considérées et du cadre global défini.

3.3. Projets expérimentaux

Sur le court-terme des sites ateliers seront sélectionnés pour observer l’influence des aménagements recommandés sur les espaces en cause. L’échelle spatiale et temporelle de ces sites-ateliers est en générale réduite. Il s’agira de démonstrations aussi bien que de tests pour l’application à la restauration.
 
Tout d’abord, sera réalisé un inventaire des sites ayant bénéficié de travaux de compensation après réalisation d’aménagements en estuaire ainsi que ceux ayant été renaturés, voire restaurés par le passé ou au cours de la période présente. Toute information portant sur les habitats estuariens ou péri-estuariens, qu’ils soient subtidaux, intertidaux, rivulaires, ou portant sur les chenaux et autres voies de circulation de l’eau, sera complétée par des données sur ce que l’on peut appeler des «  microsystèmes » tels que filandres, berges, prairies humides, bois alluviaux, bras morts... Au fur et à mesure de l’avancement des travaux, les manques de connaissances seront identifiés en vue de les combler et déterminer les recherches et études à mener et les expérimentations à réaliser en liaison avec les scientifiques. On ne perdra pas de vue le but ultime de la restauration qui vise au rétablissement de fonctionnalités écologiques. Cette première étape mènera à l’établissement d’états initiaux sur lesquels reposera en partie le choix des sites expérimentaux et du type de suivi à effectuer par la suite.

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021